Le château de Pierrefonds, un repos mérité
« De bon matin, nous partons pour Pierrefonds où nous arrivons vers midi. Nous sommes logés au château. Cette magnifique œuvre d’art restaurée sur l’ancien château fort démantelé par Violet Leduc est même un peu trop neuf.
Le billet de logement pour le 148ème ri
Il est splendide quoique un peu dissymétrique. Ce qu’il y a à remarquer c’est la salle d’honneur, la salle des Preux, la chapelle. Il est défendu de visiter ces salles mais j’escalade le toit en enjambant une fenêtre pousse une fenêtre ouverte, saute dans la salle des fêtes, visite la salle des preux, escalade un donjon mais… suis surpris et grondé par la fille du conservateur. Personne même les généraux ne peut visiter le château. C’est une sage précaution prise pour conserver ce chef d’œuvre qu’ont respecté même les Boches si peu amis de l’art. il paraît que von Kluck a logé dans ce château. C’est surprenant que les Boches ne l’aient pas saccagé. Et c’est là qu’on loge les prisonniers boches. Ils ont infesté la paille de poux de sorte que pour plus de sécurité, je couche dehors. D’ailleurs, il ne fait pas bien froid.
Le château et la salle des Preux visitée par J.Degaugue.
Lundi 21 juin
Nous sommes toujours consignés dans le château. Le service de garde (un officier) est très sévère. Cela ne m’empêche pas de sortir. Pierrefonds est une ville très coquette sous ce beau soleil de juin et qui n’a pas du tout souffert de la guerre. Ce qui est le plus à remarquer, c’est sa superbe église gothique. La ville est une agglomération autour du château qui la fait vivre
Mardi 22 juin
Quand nous sommes arrivés à Pierrefonds, un dimanche, nous étions éblouis par les toilettes des habitants, nous qui revenions du front des tranchées. Ici, nous pouvons nous ravitailler en toutes sortes de choses. Ce qui nous fait le plus plaisir, c’est la bière qui déjà devient rare. J’ai pu acheter une assiette en aluminium, du papier à lettres, des enveloppes, des cahiers et des crayons, porte-plume, encre, saucisson, pâté, vin blanc, vin rouge, fromage, poivre etc etc… Aujourd’hui je suis de garde aux prisonniers. Le temps est toujours superbe.
Mercredi 23 juin
Les hommes semblent revivre ici après avoir échappé à la mort, revenir dans un si charmant pays… Beaucoup boivent, même un peu trop de sorte que le soir ils sont gais. Et puis, ici, on peut se laver ».
Jeudi 24 juin 1915
On va se laver dans le lac. Il y a une distribution d’effets, nouvelle tenue. J’abandonne mon solide pantalon de toile bleue pour prendre un nouveau pantalon. De même, je prends une vareuse et une capote bleue clair en échange de ma vieille capote bleu foncé que j’aimais bien. Tout le monde est habillé de la nouvelle tenue
Vendredi 25 juin
Je me fais photographier en vareuse d’abord dans un groupe de trois (avec Fourrier et Leclercq) puis seul. Je suis assez bien réussi. Prise d’armes pour les décorations.
Samedi 26 juin
Le temps est toujours superbe. Nous quittons Pierrefonds vers midi par un temps superbe avec une très bonne impression de cette belle petite ville. Nous prenons le train qui nous ramène par La Ferté Milon à Fismes, Jonchéry et Muizon où nous descendons.
Des graffitis laissés par des soldats du 148ème ri.
Quelques signatures laissés sur un mur.... par des inconnus.
Lors de ce séjour à Pierrefonds, quelques soldats ont laissé une trace de leur passage. Parmi les nombreux graffitis retrouvés sur les murs du château, quelques-uns rappellent le passage du 148ème ri.
Par chance, deux des noms peuvent être associés à une fiche matricule.
Burel Henri, né le 6 août 1883 à Plovezet (Finistère) cultivateur. Incorporé le 16 novembre 1903 au 102ème ri. Dispensé pour être l’aîné de 7 enfants et soutien de famille, il ne fait qu’un an de service militaire et c’est nanti du certificat de bonne conduite qu’il est envoyé dans la disponibilité le 22 septembre 1904. Il fait donc partie des premières classes anciennes rappelées. Mobilisé le 12 août 1914, il suit une instruction jusqu’au 20 octobre 1914 date à laquelle, il rejoint le 148ème ri avec les renforts d’octobre. Il tombe malade durant l’hiver et est évacué, pour faiblesse, vers l’arrière jusqu’au 12 février 1915. Il est de retour au régiment le 13. Il combat à Quennevière, blessé à la main, il sera soigné jusqu’au 25 septembre 1915. Il rejoint le régiment le 27 septembre suivant et ce jusqu’au 8 juin 1918, accompagnant le régiment en Orient. Il sera rapatrié le 1er octobre 1918 pour maladie.
Higuet Joseph, né le 30 mai 1893 à Rancennes (Ardennes) cultivateur, Incorporé au 148ème ri le 27 novembre 1913. La guerre surprend cette classe (classe 13) alors que l’instruction est à peine terminée. Il fera toute la campagne depuis le 4 août accompagnant le régiment en Orient le 1er novembre 1915. Il décède le 22 octobre 1918 des suites d’une maladie contractée en service à l’hôpital temporaire n°8 à Salonique.
Un mitrailleur au 148ème ri originaire de Chooz. Le nom est illisible
Les autres graffitis, la plupart illisibles, font l’objet de recherches qui n’ont pas encore aboutis
Pendant cette semaine de repos, l’état-major en profite pour citer à l’ordre de l’armée ou du régiment certains soldats qui se sont fait remarquer par leur ardeur au feu. Cela ragaillardit le moral des hommes. Deux exemples parmi les cités à l’ordre de l’armée.
Jusqu'à présent... introuvable.
Dans le JMO, on cite des soldats, des sous -officiers ou des officiers qui se sont remarqués par leur bravoure face au feu.
Extrait du JMO
Soldat Monet Gaston : « jeune engagé pour la durée de la guerre, blessé et tombé entre les deux lignes où il est resté 5 heures n’a pas cessé d’exciter ses camarades et de les encourager à tirer sur l’ennemi »
Galloy Henri, clairon : « Debout sur le parapet au moment de l’assaut, sonnait la charge pendant que ses camarades se précipitaient en avant, ayant eu la mai droite percée d’une balle a empoigné son clairon de la main gauche et a continué à sonner ».
On retrouve les citations des victimes du combat de Quennevières dans les pages du journal officiel. les reprendre toutes sortiraient (par le nombre élévé des pages) du cadre de cette recherche.
Quelques exemples parmi tant d'autres
Sources
Merci à Mr. J. Bultet, historien pour son partage de sa collection de graffitis glanés dans la région Soissonnaise.
Au service tourisme du château de Pierrefonds pour l'affiche (voir page d'accueil).
Mémoire des Hommes,
JMO du 148ème ri
Les fiches Mort pour la France
Journal Officiel, lois et décrets citations au nom de...
Cartes postales anciennes (coll. pr.)