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Pour le 148ème régiment d'infanterie
13 juin 2021

1915 Entre faits de vie et faits de guerre

Janvier 1915

C’est la fête. On a touché en plus de l’ordinaire du jambon, des noix, des pommes, un cigare, un quart de vin et une bouteille de champagne pour quatre. On utilise des crapouillauds, mortiers datant de 1844, qui font la joie des Boches. La 1ère bombe n’éclate pas, la 2ème tombe à 100 m du point visé, la 3ème coupe la capote d’un homme travaillant à la sape et la 4ème le crapouillaud fait la culbute. On entend les Boches se tordre dans leur tranchée. Nous sommes toujours en première ligne à Cholera. Les cuisiniers ont beaucoup de peine à nous faire à manger, le vieux dévoué Gloagen Thomas et Marquette François.

Mauvais terrain pour faire des abris. Locquet Augustin et Docquer Jules ont failli être ensevelis dans un abri. Les abris croulent. Pont de Gernicourt, nombreuses corvées. Les hommes travaillent 24 heures par jour. Il leur faut faire un boyau de 2m de profondeur, de 0,80m de large et 500 m de long avec 26 outils en tout.

Verrai-je la fin de la guerre ? Et la fin de l’année ?

Un obus est arrivé dans la 3ème compagnie, a passé entre les jambes d’un homme sans le blesser et c’était une grosse marmite. Je suis fort inquiet sur le sort de Lecerf qui n’a pas encore répondu.

Il pleut et je dois faire le plan des tranchées.

plan

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extrait du JMO du 148ème ri. Le secteur occupé par le 148ème ri entre les fermes de la Pêcherie et de Choléra.

Je grimpe en plein jour  au-dessus des boyaux sans recevoir une balle. Nous sommes relevés et nous allons au pont de Gernicourt. On doit fournir une patrouille et pourtant il fait un clair de lune superbe. La patrouille doit rapporter un Boche mort ou vif sinon toute la nuit, elle restera dehors. il faut combattre. Les hommes sont exténués. Je vais aux distributions le long du canal avec une voiturette. Les corvées pleuvent dru. Je couche avec le capitaine.

Pour les artilleurs « aller aux crapouillauds » est une très forte punition.

Nous avons reçu un cadeau de Noël pour lesquels les Français ont versé 52 000 francs. Nous avons eu pour le bataillon c’est-à-dire 1000 hommes, 7 bouteilles de vin, 14 mandarines, 1 kilo de chocolat et un petit paquet de chocolat éventrés et un jeu de cartes….Notre compagnie touche une bouteille de vin, un jeu de carte d’un sou et trois vieilles cartes postales et 4 vieilles … ( ?). On donne 1 quart de vin à 4 hommes choisis dans les sections. Quand on pense que c’est le produit de la souscription faite en France !. J’apprends la mort de mes camarades d’école normale Lebeau, Plez, Masse, Rousseau et Humez.

Je touche quelques lacets, des pipes en terre et des sacs à viande huilés et on touche de magnifiques peaux de biques pour les officiers. On doit faire une digue le long de la route mais tout va être inondé. Les balles arrivent à nos pieds. Je vais dire bonsoir à mon camarade Rat, caporal de garde à la passerelle. En revenant, je m’égare dans l’eau. Nous discutons ensemble, le sous-lieutenant Ernest Letrange, avocat, licencié es lettres, très instruit et très intelligent, fort croyant et moi. C’est très intéressant. Nous sommes relevés pour aller à Bouffignerux. Je fais la route avec le capitaine Remy, bon père de famille qui me parle des siens.

Je retrouve Klein à la ferme Petitfrère où nous sommes très bien, avons du lait etc…

Bien entendu au repos, on fait des marches très fatigantes de 25 km.. Il y a 45 hommes par compagnie sont malades. On n’a même pas le temps de se nettoyer quand on est en repos encore plus de laver son linge.

Situation très critique. L’Aisne déborde, elle ne mesure pas moins de 350 m et nous l’avons à dos.

Tout est inondé. Le petit ruisseau de la Miette qui mesurait au plus 2 m le 24 septembre en mesure bien 75 m maintenant.

Les tranchées sont inondées. Si les Allemands nous attaquaient, il faudrait les repousser ou mourir car toute retraite est impossible. On serait noyé dans l’Aisne. Le courant de l’Aisne est très rapide. Une seule passerelle en claies incommodes permet de le traverser. Je vais chercher des légumes carottes, poireaux, oignons et  pommes de terre à Guyencourt. Nos faisons une marche Bouffignereux, Bourgogne, Bouvancourt, Guyancourt Bouffignereux.

Exercices dans les bois de Bouffignereux. Les artilleurs jouent au football. Un boche vient au-dessus de nous.

Exercice le matin. On fait monter toutes les couvertures en fer à cheval et le soir on part aux tranchées. Les boyaux sont inondés. Dans l’abri l’eau suinte et tombe toujours. Le capitaine mange une boîte de singe avec moi. Un homme  blessé à la tête d’une balle n’a pu être secouru il est mort quelques heures après dans la tranchée. Il y avait 1,20m d’eau dans le boyau.

Huchette Maison Bleue, CormicyMaison bleue, Cormicy, la tombe du soldat Huchette mort des suites de ses blessures

  Les Boches bombardent avec des obus de 130 qu’on n’entend point arriver. Le dernier passe par la porte d’un abri éclate au milieu de 4 joueurs de cartes et tue Marécaux, (la tête broyée), Brichant (la moitié de la face  enlevée, Leriche (shrapnell dans le cerveau) et Huchette (52 blessures (mort à Ventelay) et deux autres.

 http://148emeri.canalblog.com/archives/2021/02/06/38800402.html

 Les boyaux s’écroulent, la terre tombe de tous les côtés. On relève la 4ème compagnie aux tranchées de 2ème ligne. Invasion de poux.

Je vais chercher les lettres à 4 heures du matin à Pontavert le long du canal. J’ai bien failli être tué par l’explosion de 4 obus de 77 fusants qui ont éclaté juste près de moi sur la passerelle. Les Allemands tirent tous les ¼ d’heure dessus. Température assez douce pour un mois de janvier. Je ne reçois des nouvelles que de mon cousin. Bombardement intense des deux côtés.

lecerfMort pour la France. Albert Lecerf avait fait l'instruction comme moniteur de sport à Joinville avec Joeseph Degaugue. Voir Entre faits de vie et faits de guerre 1914

  J’apprends que mon plus grand camarade Albert Lecerf est tué.

On va  à Bouffignereux, près de l’infirmerie où on organise une cuisine de sous-officiers. Je pars faire le cantonnement l’après-midi. Au repos à Bouffignereux on est tranquille. On ne fait qu’une marche de 15 km. Mon cousin Henri avec qui je suis en relation suivies m’envoie malgré moi un deuxième paquet. Je ne peux me faire à l’idée de la mort de mon très cher camarade Albert Lecerf. Et les autres ? Violent bombardement, difficile de reconnaître les canons. il y en a de tous les calibres, les canons de 37 mm (torpilleur) et 65 mm (montagne), 75, 120 court, 120 long, 155 court et 155 long, 90 95 et 105  et même les crapouillauds.

Février

La cuisine des sous-officiers marche très bien. On y mange du riz au chocolat, des boulettes. Je ne paye pas n’ayant pas assez d’argent. On touche de nombreux effets, chemises, caleçons, ceintures de flanelle, bandes molletières, jerseys, chaussettes, brodequins, jambières… On rembourse les effets que nous avons achetés nous-mêmes, J’en ai achetés à Reims. Mon cousin m’a envoyé un passe-montagne mais je ne fais rien rembourser.

Les Boches doivent se servir de mitrailleuses pour tirer sur tout dépasse des tranchées, tellement leur tir est précis. Tous les moyens de défenses sont bons. Non seulement on emploie  les fils de fer (réseaux de fil) ordinaire, de fils de fer barbelés, réseaux bruns déjà employés par Jules César, mais les grenades lancées par le fusil ou à la main, les fusées lumineuses, les crapouillauds avec leurs bombes. Résultats excellents. Il y a des soldats qui tirent des lièvres et des lapins ou perdix au fusil Lebel!

J’achète un hareng saur à six sous, des confitures, des fruits confits. Tout est hors de prix. Ce soir nous allons aux tranchées de la Miette.

Grande distribution de chaussettes. Il est impossible de se débarrasser des poux.

L’Aisne est magnifique à voir avec ses 400 m de largeur. Il est beau de voir tomber les fusants dedans.  Je couche à terre dans le bureau où il n’y a guère de place, dans le charbon de bois. Je m’amuse à ramasser des fusées d’obus. On parle de relève. Je dis donc un dernier adieu au secteur. Je vais revoir Berry-au-Bac où s’est illustré le régiment. Tout n’est plus que ruines, les grosses marmites pleuvent toujours.

Nous devions aller à la gabionnade où les Boches lancent d’énormes torpilles aériennes et où l’eau monte jusqu’aux cuisses en certains endroits. On est relevé par le 310ème ri. Je vois Sausers, sous-lieutenant au 310ème ri, instituteur. (Ne correspond pas aux JMO des 310 et  110èmes RI, ce serait alors un autre régiment !)

Relève très fatigante. On attend à Roucy toute la nuit, très fraîche et même très froide. A la pointe du jour, nous allons à Bourgogne entre Ventelay et Bouvancourt. Grande distribution d’effets de tous genres, chaussettes, tricots chemises caleçons etc… Je change de linge pouyr les poux.

Rien à signaler sinon une forte pluie. Départ imminent

14 février 1915

Nous allons à Prouilly. Le sac pèse très lourd. Nous recevons un renfort. Je crois que c’est du repos ; un civil m’avertit que nous devons attaquer le lendemain matin au Luxembourg ( Hermonville).

L’attaque sur le Luxembourg

http://148emeri.canalblog.com/archives/2021/03/23/38881075.html

Départ à 1 heure du matin. Fatigue du sac. Nous arrivons à 7 heures du matin dans le ravin. Les pièces de 75 tirent sans discontinuer. L’attaque se déclenche ; le 5e d’infanterie au Godat et le 39e d’infanterie au Luxembourg. D’abord c’est la marche triomphale, sous le ronronnement harmonieux du 75 ; le 39e régiment d’infanterie va arriver presque au canal,

Le 3e bataillon du 148e s’engage ; notre compagnie aussi. Je glisse et tombe dans la boue. Les grosses marmites boches tombent près de nous. Un soldat du 5e qui a une main arrachée revient en dansant. Il crie « qu’il a le filon ». 2 prisonniers boches passent. Les gros noirs s’écrasent. Une mitrailleuse qu’on n’a pu repérer crache sans discontinuer sur nous. Nous sommes à la route 44. Les 210 fusants  éclatent au-dessus de nous. Je compte presque 8 gros noirs qui éclatent en même temps sans tous les 77. Ils éclatent 50 mètres trop court.

Un aéro boche volant très bas fait allonger le tir de sorte que la flamme des éclatements vient jusque dans les boyaux. L’attaque est paralysée grâce (à cause) au 5e qui n’a pas avancé assez vite. Les gros noirs encadrent les sections déployées en tirailleur. Nos mitrailleuses essaient vainement de mettre en batterie. Je reste calme au milieu de tout cela. Les soldats reviennent hébétés, abrutis sous la commotion cérébrale produite par les éclatements de si gros obus. Brimont en aura lancé des obus. C’est une diversion que nous avons tentée qui a bien réussi. C’est pour soulager  nos camarades qui attaquent à Beauséjour en Argonne. Nos obus ont fait sauter deux fois le pont boche mais toujours il est rétabli. L’effet moral produit par les gros obus boches est très grand. Nos 75 qui ont bien balayé les premières lignes boches que nous avons prises sont trop faibles pour riposter à la grosse artillerie ennemie. Il en tombe des marmites sur Cauroy. Le commandant Bertrand très brave s’énerve. On va à Droite à gauche. Notre 3e bataillon a été engagé à la place du 39e. Deux compagnies, la 9e et la 11e, envoyées dans les bois du Luxembourg ne nous donnent plus signe de vie.

f 8ème bgUn exemple des pertes estimées,  la 10ème compagnie

Le soir tombe, nous allons en avant. On va faire une attaque de nuit. Nous sommes exténués et nous mourons de faim. Le temps splendide dans la journée devient très froid. On marche dans la nuit. Brimont crache encore quelques rafales mais il a épuisé toutes ses réserves. Vite il doit se faire ravitailler.  On passe à droite du ruisseau du Luxembourg, on traverse la ferme, on enjambe plusieurs arbres abattus par les obus. Maintenant c’est une véritable marche funèbre dans le calme de la nuit. De nombreux blessés râlent, hurlent, geignent, se lamentent, pleurent, implorent du secours. Je suis resté calme, enthousiasmé le jour. Le spectacle me fend le coeur et m’impressionne. Il faut bien faire attention pour ne pas marcher sur les morts. Il y a plus de deux milles hommes étendus dans la plaine. Beaucoup se débattent dans les affres de la mort. A quoi servent toutes ces tueries pour n’avancer que de 400 mètres. Cela est véritablement impressionnant. La compagnie reste en colonne par quatre dans la plaine. Heureusement que les boches ne nous voient pas. Je vais aller faire une patrouille pour reconnaître en avant et se mettre en liaison avec les deux compagnies disparues qui sont sûrement prisonnières. C’est aller à la mort. Tout à coup, contre ordre. Le bataillon se rassemble sur la route 44 près de la ferme du Luxembourg où les allemands ont envoyé tant d’obus. Si la fantaisie leur prenait de tirer là, quelle boucherie ils feraient dans une foule de 1000 hommes tassés sur la route à cause de l’incertitude des commandements. Enfin nous allons passer la nuit dans des abris creusés un peu en arrière près du moulin dans la craie. Pour être reçus de la sorte, je crois qu’on a dû être trahis.

Corrmicy, les ossuairesPlusieurs soldats du 148ème ri tués lors de ce combat reposent dans la nécropole de Maison Bleue à Cormicy, certains dans les tombes individuelles, d'autres dans les deux ossuaires

On ramène toujours des blessés. Beaucoup sont morts de froid dans la nuit sur le terrain. Le soir nous allons à Hermonville.

Je couche dans un grenier appartenant à Mr Despagnes, ancien proviseur du lycée de Valenciennes, natif de Cauroy.

Les Boches ont dû savoir qu’il y a de nombreuses troupes à Hermonville ( 39-148-45-5èmes ri) par des prisonniers. Ils bombardent avec leurs mortiers de 305 autrichiens installés à Brimont, la ville.

19 février, Hermonville

Un obus tombe  à 20 m de mon grenier tuant 2 musiciens et un enfant de 12 ans. Un autre  coupe un gros arbre d’1 m de diamètre et fait un trou de 4 m de diamètre et 1,50 de profondeur. C’est sans doute un tir de représailles. Quel bruit cela fait en l’air et encore plus en éclatant, pourtant ils économisent de si gros obus.

hermonville mairieLa mairie d'Hermonville, là où se trouvait la morgue

Je vais à la morgue où il y a beaucoup de morts (mairie d’Hermonville). C’est triste à voir. Un  gros obus est tombé sur la maison d’un mercanti qui nous vendait du vin ordinaire à 2 fr le litre, éventrant les barriques et un autre a démoli le familistère d’Hermonville.

 

 

 

hermonville

 La place du village d'Hermonville

Nous arrivons au repos à Courcelles.

http://148emeri.canalblog.com/archives/2021/06/06/39003103.html

Je couche près de mon ami Dubrecq Alexandre dans un grenier. Nous n’avons jamais été si loin du front. Notre popote installée dans une maison abandonnée marche très bien grâce à son chef Emile Diare ( ? inconnu), armateur qui vient des Sénégalais. Il fait très froid dans ce grenier. Enfin on peut se laver et faire laver son linge et se ravitailler. On mange bien, jambon, œufs, poulets saucisses etc. On vit en famille. Plaquin Gaston nous amuse avec ses réparties. Les compagnies vont à l’exercice. On peut de temps en temps se procurer un journal.  Quelle aubaine A part le vin et quelques rares denrées, le ravitaillement est encore bien limité. Je me propose d’aller voir mon camarade Firmin Rat qui vient de passer sergent à la 10ème  compagnie à Rosnay mais je ne peux pas le faire à cause des nombreux états à fournir. Il arrive un nouveau caporal-fourrier. Il paraît que notre séjour va encore durer longtemps. C’est incroyable.

1er mars

Le temps est toujours bien frais. Je quitte mon grenier troué pour aller coucher avec Lecerf Camille. Nous allons au tir à Sapicourt. C’est ridicule en temps de guerre à moins de le faire sérieusement. D’ailleurs, je tire assez mal. Je vais au ravitaillement pour la compagnie à Branscourt, Muizon, Rosnay et Courcelles.

secteurLe secteur dont parle J. Degaugue

La compagnie va à l’exercice, je fais de la besogne de bureau ;

Samedi : Je lis « Les contes du lundi ».

Dimanche, repos, je lis le théâtre de Labiche, « La grammaire » et « Les vivacités du capitaine Tic ».

Lundi : Je lis « Le voyage de Monsieur Pérignon », «  Le chapeau de paille d’Italie, « Les petits oiseaux » et « La poudre aux yeux ».  Autant de livres en trois jours ?

L’institutrice de Courcelles a une conduite plutôt légère. A quoi peut-on encore se fier ? Marche par Sapicourt, Treslon, Rosnay. Je me fais photographier par un peintre à Faverolles (petite photo 6/9 ancienne, ternie, foncée) !

Je vais visiter le parc d’aviation de Courcelles-Rosnay et je vais à l’exercice où je dois commander la section. Le temps est toujours assez froid. Nous passons en ce moment une bonne partie de l’hiver.

bouilliez degaugueLe cadre de la 3ème compagnie

  Lundi 15 mars, je suis nommé sergent  à la 3ème compagnie, l’adjudant Bouilliez est nommé sous-lieutenant à la 3ème compagnie aussi. Je suis affecté à la 3ème section avec le sous-lieutenant Bouilliez. Je commande les 11ème et 12ème escouades.

Je me fais photographier par le curé de Faverolles avec la capote du sergent Lefevre Roger ( ?inconnu dans l’organigramme) de la 1ère compagnie (capote gris clair, nouvelle tenue). Je retrouve Dupret Maurice, sergent, 2ème section à la 3ème compagnie. Nous nous sommes déjà connus 1 an à Douai et présenté ensemble à Saint-Cloud.

19 mars, jour de ma fête, on s’amuse très bien  à la popote de la 3ème compagnie où j’ai reçu un excellent accueil. On rit avec Gobert. A la popote, ce que j’aime c’est la camaraderie, L’adjudant de bataillon Adam ( ? inconnu dans l’organigramme) est plein d’entrain.

Nous allons à Faverolles tous ensemble les sous-officiers de la 3ème compagnie, l’adjudant Lemaître (il y a un adjudant Lemette) , Rat Firmin et Dewailly ( ?),  ancien élève des A.M. catholiques de Lille. Nous nous y amusons énormément et même un peu trop. Nous nous faisons photographier tous ensemble.

On va à l’exercice sur le plateau de Rosnay, on fait une prise d’armes en l’honneur des nouveaux officiers. Le lendemain, exercices sur le plateau de Rosnay, jeux divers. Je fais la leçon à la section. On aperçoit de Courcelles, la cathédrale de Reims si mutilée. Les Boches bombardent toujours la pauvre ville. La popote nous rappelle le (ill) … Nous mangeons dans une maison,  dans des assiettes et tous les jours nous mangeons de la bonne soupe. Les gens chez qui on mange sont très gentils à tel point que nous ne les désignons que sous le nom de grand-père et grand-mère Cornu.

On reçoit un renfort du 151ème ri (  étonnant,  en mars avril, le 151ème ri est sévèrement engagé à la Harazée et a besoin de tous les hommes). Je vais à l’infirmerie prendre des bains de formol pour les pieds. Nous sommes brigade volante. Il paraît que nous sommes en réserve pour l’offensive. Nous recevons un deuxième renfort. Nous allons faire des manœuvres de brigade très fatigantes à Branscourt et à la ferme Montassin. Nous recevons une cuisine roulante qui nous fait du bon rata. Je dois emprunter de l’argent pour arriver à payer la popote. On ne se refuse rien. Quelle quantité de vin nous buvons. Le prêt ne suffit pas. Nous recommençons la manœuvre de brigade qui a été si pénible. Il pleut, nous souffrons beaucoup. Je rencontre Dupriez, mitrailleur aux Chasseurs d’Afrique. (le 6ème régiment de chasseurs d’Afrique est présent dans la brigade)

ReimsLa cathédrale de  Reims

  Nous sommes dans la région du vin de Champagne ici à Courcelles. Le kilo de raisin vaut en moyenne 2 francs. Le vin de pays est excellent et nous le payons 2 fr le litre. C’est le véritable vin qui sert à faire le Champagne. Le pays est magnifique, assez accidenté. Au loin nous voyons Reims avec les tranchées boches qui la dominent. Nous allons au tir. Manœuvres au village de Gueux. Je lis « Don Quichotte » de Cervantes. Je reçois trois feuilles pour avoir des colis. J’en donne une à Camille Lecerf, une à Heussin Henri de L (ill)…. et une au jeune Monnet Henri de Douai (école annexe). Le temps s’est bien amélioré, néanmoins il pleut. Nous allons jusque Germiny. Au loin nous voyons les saucisses boches et françaises de Berry-au-Bac, Brimont, La Rompelle etc… les caves Pomery et la cathédrale meurtrie.

mercredi 14 avril.

MB Ossuaire 2 listeQuelques noms de soldats du 148ème ri retrouvés dans l'ossuaire n°2 de Maison bleue

 

  Boum ! Nous allons aux tranchées au Luxembourg où nous avons perdu tant de monde le 16 février. On croyait qu’on n’y retournerait plus et pourtant…

http://148emeri.canalblog.com/archives/2021/03/23/38881075.html

 « Une des erreurs du Commandement (du moins en ce qui nous concerne, mais nous n’étions pas les seuls) a été de ramener et ramener les survivants – les mêmes hommes – sur les mêmes champs de combat où la mort les avait épargnés. »  (La mort de près,  Maurice Genevoix)

Sources

Ad 72, carnets de J. Degaugue 1j461

Mémoire des Hommes, JMO du 148ème ri et fiches MPLF

Carte Géoportail, lieu  Sapicourt

Photos personnelles et cartes postales anciennes

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