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Pour le 148ème régiment d'infanterie
17 février 2020

La dernière "marche rétrograde"

De Coucy-le-Château à la Marne

 C'est donc avec un effectif plus que réduit que le 148ème ri reprend sa marche vers la Marne. La composition du "régiment" sous la conduite du colonel Cadoux. Deux bataillons très incomplets et une section de mitrailleuses. Un millier d'hommes tout au plus! Au Ier bataillon, il manque des sections dans chaque compagnie, au IIè bataillon, il manque deux compagnies entières, quant au IIIè bataillon....

ont rejoint

Retardé de 24 heures par son combat à Coucy-le-Château,  le 148ème ri doit, à coup de marches forcées, rattraper le temps perdu et rejoindre au plus vite le 4GDR dont il fait partie (4ème groupe de divisions de réserve) . Marches de nuit suivies de marches de jour à peine entrecoupées de brèves périodes de repos voire de sommeil.

Il faut éviter les villages qui pourraient être occupés par l’ennemi, un ennemi qui progresse rapidement. L’itinéraire, assez chaotique, semble désorienter les hommes. Des hommes fatigués qui allègent leur « bardas » « On erre toute la journée, on marche sous bois, depuis hier, on n’a pas mangé. Fatigué "!  Et le lendemain, « On n’a encore rien mangé. Heureusement qu’il y a beaucoup de pommes. J’ai trouvé un peu de lait, un camarade a trouvé un seau de vin,  je suis content de manger des betteraves. Je regrette d’avoir abandonné un peu de linge hier, surtout ma veste » note J.D. dans son carnet..

Le Chemin des DamesLe Chemin des Dames qui deviendra tristement célèbre en 1917.

Le point vert, la ferme Panthéon

  Des détails qui mettent en exergue le dénuement de ces soldats privés de leur train de ravitaillement. Les villages défilent : Pinon, Chevignon… « Je poursuis ma marche, écrit le colonel, en suivant le Chemin des Dames. J’arrive à la ferme de Panthéon où je fais reposer mon régiment en plein champs, avant de reprendre la direction de Bray en Laonnois puis Moussy ». Avancer, toujours en esquivant les nombreux partis ennemis qui sillonnent la région. L’Aisne se rapproche et malgré les fatigues qui s’accumulent, il faut encore s’activer, forcer la cadence,  car le génie a reçu l’ordre d’en faire sauter les ponts. Le pont de Bourg est déjà détruit, le régiment se dirige vers celui de Pont Arcys, sauté lui aussi, et enfin celui de Chavonnes, heureusement encore intact. « Si on arrivait ¼ heure plus tard, le pont était sauté » explique J.D. L’Aisne et son canal sont franchis. Un premier groupe d’attardés rejoint le régiment. C’est le lieutenant Lucas et sa section de la 4ème compagnie, il est accompagné d’autres soldats ralliés en cours de route.

 

pont ArcyDe nos jours, le pont sur l'Aisne à  Pont Arcys et la gare du village qui se trouve avant le pont

gare de Pont Arcy

le pont de chavonnesLe pont de Chavonne sur l'Aisne et le canal de  Pont Arcys (au loin) à Chavonne.

le canal aisne

pont arcys détruitLe pont de Pont Arcys, détruit.

« On dit que les traînards sont pris. Qu’est devenue ma 5ème compagnie. Prisonnière ?» s’inquiète notre témoin. La marche continue, de nouveaux villages sont traversés. Des petits bourgs dans lesquels les officiers recueillent des informations sur l’avance ennemie. Soissons est tombé, Vauxaillon est occupé par  un régiment de cavalerie, d’autres cavaliers cantonnent dans le village d’ Allemant…

cys la communeCys-la-Commune vu de l'écluse à proximité du pont de Chavonne

canal de l'Aisne

  A Cys-la-Commune, bref repos, puis Saint-Mard, Vuxtin, Courcelles et Bazoches. Un arrêt forcé : « Vers deux heures, nous sommes arrêtés par de l’artillerie ennemie mais protégés par des 75 miraculeux » explique J.D. Ces pièces d’artillerie  établies à Lesges ayant repéré le mouvement de la troupe, ouvre le feu sur la colonne. L’intervention des 75 français, en position à Mont Notre-Dame,  permet au régiment de se défiler vers Dravigny « en formation largement articulée ». Un bref repos y est accordé aux hommes. La marche reprend vers Sergy où  les fantassins peuvent passer une nuit quelque peu réparatrice. Il est néanmoins  plus de minuit lorsqu'ils dépônent leur "bardas", ils marchent depuis le 1er septembre à 10h 30, quelques 38 heures sans un arrêt « raisonnable » avec en plus un combat d’une dizaine d’heures !

Le 3.

A peine les hommes assoupis qu’un ordre tombe, abrégeant de nouveau leur repos. Il faut se remettre en route afin de franchir au plus tôt la Marne dont les ponts doivent sauter. « On erre toujours, beau temps, chaleur, soif, on cueille quelques noix » raconte notre témoin. A travers champs et bois, le régiment qui a reçu l’ordre de ne pas emprunter les routes se dirige vers Jaulgonne et passe la Marne au pont de Maizy. Une « grand halte » est ordonnée quelques kilomètres plus loin car les trains de ravitaillement et de combat viennent de rejoindre. Des distributions de vivres réconfortent les hommes qui n’ont plus rien  mangé de consistant depuis quelques jours. « On fait de la soupe (soudain) des obus pleuvent dans les marmites. Retraite précipitée ». De nouveau, un moment de repos interrompu par une batterie allemande installée au Nord de la Marne. La retraite reprend et le 148 ème ri, du moins ce qu’il en reste, retrouve le 4GDR. Un lieu de bivouac lui est assigné à Artonges.  La troupe s’établit dans la partie Nord du village, depuis l’église et jusque la voie ferrée. C’est une mauvaise journée pour notre témoin qui vient de s’apercevoir de la perte de son porte-monnaie contenant 40 francs. Toute sa fortune.

Un bivouac encore une fois écourté par l’évolution des éléments.

Le 4.

Départ précipité. Les Allemands occupent Château-Thierry et sont en passe de franchir la Marne. Il faut encore reculer. Vers la Seine ? Le régiment se fraye un passage sur des routes de plus en plus encombrées. « Tout est mêlé, zouaves, trains de combat, artillerie, génie, chasseurs à cheval… Quelle pagaille. Quelle soif, que de fatigue » se plaint notre témoin. Les lambeaux du IIème bataillon sous les ordres du capitaine Mathieu sont détournés à deux reprises pour servir de soutien à de l’artillerie qui couvre la retraite. Quelques obus tombent près des défenseurs et en blessent un. Les restes de la 5ème compagnie, une vingtaine d’hommes, sont présents. « Soutien d’artillerie pour laisser couler les convois, toute la journée, on protège la retraite. je vais chercher un lièvre qu’un obus à tué à une vingtaine de mètres. Quelle aubaine ! » précise J.D. Le Ier bataillon l’attend à Fontaine Armée afin de gagner, ensemble, le bourg de Beauchéry. Enfin, un vrai bivouac. Un premier repos digne de ce nom, et ce, depuis le 22 août.

Le 5

La journée du 5 septembre se passe au village. Dormir et remettre son équipement en ordre.

Le lendemain, le 6, encore une journée de repos ! Mais.....

 Sources

Les mémoires du général Cadoux

JMO du 148ème

Les carnets de notes de J.D. (Joseph Degaugue) AD72, 1J1472

Géoportail carte de Pargny-Filain, ferme de Panthéon.

Photos personnelles et carte postale ancienne

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