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Pour le 148ème régiment d'infanterie
7 septembre 2018

L'apprentissage au métier des armes

metier 4

En ce matin d'octobre...

Valise ou sac en mains, ils se présentent au corps de garde de la caserne et après quelques rapides formalités, ils intègrent la vie militaire…

"Ils", ce sont ces jeunes gens qui après avoir passé le conseil de révision et avoir été jugés aptes au service, se présentent, ordre de rejoindre en mains, à la caserne! Ils ont tous vingt ans, ils travaillent déjà depuis quelques années, d’autres viennent de terminer leurs études ou bien les interrompent le temps du service. Deux ans à passer sous les drapeaux! Bientôt 3 si la loi passe!  Une fois franchie la porte de la caserne, troquant leurs habits civils contre un uniforme, les voici soldats! Soldat de seconde classe!

metier 5La quille dans 15 jours!

Dans la cour, des anciens qui les regardent... eux qui arborent fièrement le nombre de jours restant à servir! 

Issus de milieux différents et n’ayant pas tous, loin s’en faut, le même degré d’instruction, ces compagnons de conscription vont découvrir la vie militaire. Les voici plongés dans un autre monde qui n’a rien de commun avec ce qu’ils ont connu jusqu’à présent. Ces jeunes qui sortent généralement de l’usine, d’une exploitation agricole, parfois d’un bureau ou d’un commerce voire d’un atelier d’artisan et, à de très rares exceptions, des études vont apprendre la cohabitation, le « vivre ensemble » au quotidien, du matin au soir, du soir au matin. Et tout cela rythmé par le son d’un clairon, cette « trompette en uniforme* ». Rien de comparable avec leur vécu!

Tous pareils... enfin presque!

metier 6 brassage aDans cette classe 1913, pour ne prendre qu'elle, les exemples de contrastes ne manquent pas ! Il serait vain de vouloir les épingler tous ! Une tour de Babel culturelle et sociale. Pensons à ce séminariste ou bien à cet artiste lyrique qui devront s’habituer au langage un peu rude de leurs voisins de chambrée Imaginons ces parisiens- ce coiffeur, ce chauffeur de taxi ou bien encore cet employé dans les wagons-lits - au milieu de ruraux qui ne se sont que très rarement éloignés de leur village. Ces Lorrains, ayant demandé la naturalisation, se comprennent-ils facilement avec les Ardennais? Et ces Bretons de Quimper ou de Vannes qui côtoient des compères qui n’ont jamais vu la mer !. Enfin, arrêtons-nous sur ce pauvre gars venu de son Hérault natal pour se perdre dans la froidure de ce Nord. La vie militaire va ajuster toutes ces différences pour constituer avec cette société hétérogène, un corps homogène !Un régiment!

Un uniforme qui gommera les différences

metier 6b

Ce régiment qui est, précise le colonel Cadoux, « composé de gars solides et disciplinés, Ardennais pour la plupart ». Si l’on ne doute pas de la solidité « des gars », la notion d’Ardennais semble échapper à ce chef de corps. Le département des Ardennes  est certes bien représenté dans les effectifs mais c’est sans compter sur le département du Nord (Avesnes, Cambrai Valencienne et Lille) ou ceux plus éloignés de la Seine (Paris, bureaux 1 à 6), du Pas-de-Calais (Saint-Omer, Dunkerque) voire même, mais dans une moindre mesure, du Finistère et du Morbihan, de la Moselle qui fournissent eux-aussi leur lot de conscrits. Il y a également ceux venant de Belgique, des expatriés qui rentent au pays pour servir.

metier 5 aaS'équiper de pied en cape...

Immédiatement, les "bleus" passent à l’habillement, troquant leurs effets civils pour une tenue d’exercices, le bourgeron , une tenue de campagne et une tenue de sortie.

le bourgeron

 

 

 

 

 

la tenue dite "bourgeron"

Leurs effets civils seront empaquetés dans un sac et renvoyés à la famille. Ils reçoivent également un sac et une musette devant contenir tout le nécessaire à la vie du soldat. De la nourriture pour deux jours, du sous-vêtement jusqu’aux aux brodequins…. . A quoi il faut ajouter la pelle-pioche et divers ustensiles de cuisine comme la gamelle, le quart, les couverts, une gourde, un bouteillon,  s’ajoutent encore  une tente individuelle, une couverture… Il devra s’habituer à porter tout cela. Enfin il recevra son fusil, une baïonnette, la rosalie,  et des cartouchières. En tout….Une trentaine de kilos !  Lors de la campagne, beaucoup de soldats allégeront leur sac afin d'avoir une charge moins importante à porter parfois même ils l'abandonneront. D'autres, pressés par l'ennemi,  le perdront lors d'un combat ou d'un repli.

  Afin de se rendre compte d'un équipement dans sa réalité,        http://www.lesfrancaisaverdun-1916.fr/uniforme800.htm

Mais l’habit ne fait pas le moine !

Un apprentissage, long et progressif va transformer la jeune recrue, incompétente en un « soldat alerte, vigoureux, apte à supporter moralement et physiquement les fatigues et les privations de la guerre ». C’est ce que préconise le règlement militaire, le code de l’instruction, et ce sera le rôle des officiers et sous-officiers  instructeurs que d’inculquer toutes ces connaissances à ces jeunes gens du contingent. Progressivement ! Au début en petits groupes, par section, puis au niveau de la compagnie enfin au niveau du bataillon pour terminer par tout le régiment. La discipline, le tir, la marche, l’éducation physique, le déplacement tactique  ou bien encore  le service en campagne… la matière est vaste mais la « pédagogie » militaire est efficace. Une fois acquis, tous ces  apprentissages seront appliqués et peaufinés lors de manœuvres.

musique en tête,Marcher avec la musique du régiment en soutien

  Marcher au pas ! Pas évident pour beaucoup de ces bleus ! La marche sera quotidienne et progressive tout comme le portage du sac. On marche à une vitesse de 6 km par heure avec un repos de 10 minutes toutes les heures. On commence avec un sac légèrement chargé… Lors de la retraite, les hommes du 148ème RI ème, parcourront des distances de 30 à 40 km par jour afin d’échapper à l’ennemi, sans manger et buvant plus que rarement !

Les mouvements en campagne s’apprennent à force d’exercices. Marche en tirailleurs, en files ouvertes, se déplacer en profitant  des replis du terrain pour approcher l’ennemi, pour se défiler, courir lors d'une charge à la baïonnette, se replier en ligne, tout en faisant le coup de feu.

A l'assaut d'une position, la charge!

musique entrainement

 

 

 

 

 

 

 La rigueur du geste.

La gymnastique et le sport aident à cet apprentissage mais combien de ces jeunes gens ont-ils pratiqué la gymnastique avant leur entrée  au régiment ? Joseph Degaugue, soldat de la classe 1913, a suivi les cours d'instructeur de sports. Il a terminé sa formation en juillet 1914! Si la guerre n'avait pas éclaté, il aurait certainement formé les jeunes recrues...

metier 8 gymDes gestes sportifs qui serviront par la suite.

gymnatique soldats

 

 

 

 

 

 

 

 

gymnastiqye soldat

 

Courir, vite et longtemps avec armes et bagages!

metier 8 exercice

 

 

 


 

Le sport n'est pas sans risque... le 13 septembre 1913, Emile Solhet se blesse lors d'un exercice de gymnastique, "en descendant les pentes du fort de Charlemont" atteint d'une entorse grave du genou avec épanchement..." Il n'est pas le seul..., le 25 octobre 1912, vers  9 heures, au cours d'un exercice de gymnastique, un autre soldat ..." au terrain des pistes a été atteint d'hydarthrose légère du genou gauche"...Le capitaine Couthaz Repland devra garder la chambre pendant un mois, suite à une entorse..

L'un blessé pendant l'exercice, le second lors des manoeuvres

 

blessé à la gym Didier officierLe lieutenant Didier (+ Onhaye) et le sergent Fraison (+ Bouvignes)

blessé sergent fraison blesse manoeuvres

 

 

Meuse 1

 

Franchir un cours d'eau.

Exercice sur la Meuse, devant la caserne. L'encadrement pour cet exercice est particulier. Des maîtres-nageurs accompagnent chaque barque occupée par les fantassins en tenue de campagne (arme et bagages).  En cas de problème, ils interviendront, de quoi rassurer les soldats. Mais en cas de conflit....  ?

 

manoeuvres

 

 

 

 

 

 

 

 

L'entraînement tire à sa fin, il est temps d'appliquer  les apprentissages dans une "certaine" réalité. Les grandes manœuvres d'automne sont l'occasion de mettre les soldats en situation.   Le retour des manoeuvres, musique en tête. La foule assiste en nombre à chaque départ, à chaque retour. " Une foule d'enfants et de ménagères" précisent les articles de presse.

metier 1aDes  fantassins se spécialisent

0 a exercices

 

 

 

 

Plusieurs soldats devront suivre une instruction spéciale pour servir dans une section de mitrailleuses. Changer le canon, se servir du télémètre, alimenter l'arme en bandelettes de cartouches... des fonctions que chacun doit pouvoir assurer afin de remplacer un frère d'armes blessé ou tué lors  d'un combat.

Les corvées

0000Couteau en mains....

  Mais en plus de ces nouvelles techniques à assimiler, il y a des nécessités logistiques à assurer QUOTIDIENNEMENT pour le bon fonctionnement de la caserne. Problèmes résolus grâce aux corvées auxquelles tous sont soumis : entretenir les locaux communs, préparer les aliments pour les repas, ravitailler les poêles en bois et charbon, soigner les chevaux. Des corvées dont certaines sont plus "difficiles" à effectuer comme le nettoyage des latrines. Les sous-officiers surveillent le bon déroulement des opérations ainsi que la présence de tous les hommes. Des sanctions tomberont en cas de négligence ou d'absence.

 

aa corvées légumes

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La corvée légumes...

Quartier libre ou  une permission...

Au milieu de ce programme plus que chargé, les apprentis soldats disposeront de quelques permissions, à la demande semble-t-il, des permissions agricoles pour aller aider la famille, des permissions plus courtes pour leur rendre une simple visite. La fréquence ? Plus fréquentes seront les sorties dans la ville voisine. Une sortie surveillée par un "piquet" de soldats qui déambulent, sous la conduite d'un officier, dans les rues afin de sanctionner les excès de certains permissionnaires. Il y  va de la tranquillité de la société civile.

aaaaa

 

 

 

 

 

 

 

 

ed barant verdun 1905Edmond Barant, soldat de la classe 1905. Son frère Ernest, lui aussi du 148ème ri trouvera la mort à Flavion lors de la retraite. Une page lui est consacrée

metier 7a

 

 

En ville

L'occasion pour les soldats de se faire "tirer" le portrait par  le photographe local (une belle source de revenus pour cet artisan). L'occasion également d'acheter une carte postale afin de donner des nouvelles à la famille.

 

metier 8 marche

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

"Je vous écrit c'est quelles ques lignes pour vous faire savoir que je me porte toujours bien. j'espère que ma carte vous trouvera de même à son arrivée".

Au cours de leur service militaire, certains passent soldat de 1ère classe, voire caporal pour plus dégourdis. Les plus appliqués seront récompensés par  le brevet de "bon soldat" au terme de leur service. En revanche, certains, plus réfractaires à la discipline de groupe, purgeront des peines dans les locaux ad hoc… Les mois passent, les soldats sont formés,  ils peuvent défiler dans leur ville de garnison, les musiciens sont capables d’assurer l’accompagnement musical d’un défilé voire d'animer un concert... Les recrues sont devenues des soldats.

 

défilé à Givet

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Lors d'une sortie "en ville" avec la tenue dite du "bourgeron"

bourgeron, Givet 1

 

 

 

 

 

 

 

 

bourgeron, Givet 2

Mais parfois....

000 01Une infirmerie est bien nécessaire avec la présence d'autant de soldats. Des petits "bobos" lors de la séance de gymnastique, quelques maladies anodines qu'un traitement "militaire" soigne efficacement... Malheureusement, il y a quelques cas qui nécessitent une évacuation vers  l'hôpital militaire voisin.

dcdHM

 

 

 

 

 

Martin Arthur, décédé à l'hôpital militaire de Givet le 25 novembre 1912 d'un ictère grave.

 

Martin Arthur était né le 22 juillet 1891 à Houdain et exerçait la profession de marbrier

 

avat

Sources

Un site sur l'équipement militaire en 1914.

http://www.lesfrancaisaverdun-1916.fr/uniforme800.htm

Archives départementales des Ardennes et du Nord et  Pas-de-Calais, registres de la matricule.

cartes postales anciennes, merci à A. (anonymat demandé)

Les archives Gallica.

 "Le clairon, cette trompette en uniforme" paroles d'une chanson de J. Brel

Photo de famille

 

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